Discours Du Dr Patrick BOUET, Président du Conseil national de l’Ordre des médecins

Madame la Ministre,
Chers confrères,
Chers partenaires de la santé,
Je suis très heureux, Madame la Ministre des Solidarités et de la Santé, de vous accueillir pour inaugurer le 3e Congrès de l’Ordre des médecins. Je vous remercie de nous faire l’honneur de votre
présence.
Je suis heureux d’accueillir un médecin, ministre de la santé. Non pas par corporatisme, mais parceque nous avons en commun la connaissance du métier de médecin, et de leur engagement dans les
grands enjeux de santé publique, à l’instar de la prévention, dont vous avez fait une priorité de votre action.
Je crois, madame la Ministre, que nous devons à cette expérience partagée d’avoir enfin vu émerger un discours nouveau sur l’accès aux soins dans les territoires. La présentation de votre plan de lutte
contre les déserts médicaux semble montrer qu’enfin les professionnels de santé ont été entendus !
Qu’enfin notre système de santé sera fondé sur la confiance accordée aux professionnels qui chaque jour travaillent au service des Français. Qu’enfin le Gouvernement a compris qu’il était urgent de lutter contre la tentation d’hyperadministrer
notre système de santé, à l’encontre des médecins et au détriment de leurs patients.
Madame la Ministre, nous vous remercions d’être la Ministre qui a su reconnaître l’importance des territoires, et qui dit vouloir entendre les médecins et tous les professionnels de santé sur le terrain.
Nous sommes par ailleurs heureux d’accueillir en vous une femme de dialogue. Depuis votre nomination, nous avons très régulièrement échangé. Cela ne nous a pas surpris, car nous vous
connaissions déjà cette qualité. Déjà, lors de la grande consultation que nous avions menée en 2015,
vous aviez accepté notre invitation à échanger, dans vos responsabilités à la tête de l’Institut national du cancer.
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Cette volonté de dialogue, qui tranche tant avec les cinq années subies par tous les professionnels desanté sous le précédent gouvernement, vous en avez fait votre première action en prenant la tête de ce ministère. Nous nous en félicitons et n’ayez aucun doute : nous prendrons pleinement part à la concertation sur la stratégie nationale de santé que vous avez lancée. Nous y réaffirmerons que le
médecin doit être au cœur du système de santé. Nous y porterons les propositions de réforme voulues par les médecins, comme nous le faisons inlassablement depuis deux ans.
N’en doutez pas, vous trouverez dans l’Ordre un partenaire dans le dialogue et dans l’action dès lors que nous en partagerons les objectifs et les moyens. Nous avons notamment soutenu votre volonté d’élargir l’obligation vaccinale à 11 vaccins. Ce combat est aussi le nôtre.
Un constat et des priorités partagés
Nous saluons aussi le changement de paradigme important qui sous-tend votre plan de lutte contre les déserts médicaux.
Ses orientations vont dans le bon sens, et nous le disons. C’est en ce sens que l’Ordre des médecins travaille depuis qu’il a lancé la grande consultation. C’est en ce sens que vont nos propositions pour
l’avenir de notre système de santé.
Après la grande consultation menée en 2015, l’Ordre a publié en janvier 2016 son livre blanc pour l’avenir de notre système de santé. Un an plus tard, en février 2017, nous avons publié le projet de
réforme voulu et attendu par les médecins.
Dans ces deux documents, nous appelions à construire l’avenir à partir des territoires, en faisant confiance aux acteurs de terrain, et en mettant fin à l’hypercentralisation, à l’hyper-administration
de notre système.
Tous les médecins, quels que soient leur spécialité et leur mode d’exercice, portent en effet dans leurs territoires une mission de service public. Tous sont acteurs de la prévention. Tous sont des
maillons de la continuité des soins. Ce rôle doit leur être reconnu ; la confiance doit leur être accordée.
Pour renforcer encore nos propositions, nous nous sommes attachés à mettre en valeur des initiatives territoriales, portées par des médecins. Elles nous montrent que c’est sur le terrain que
naissent les solutions innovantes, qui permettent de favoriser l’accès aux soins et d’améliorer les
conditions d’exercice de nos confrères.
Nous constatons avec satisfaction que cette vision s’est imposée au cœur des réflexions. Elle irrigue les propositions et les discours de nombreux acteurs de la santé. Nous sommes très heureux,
Madame la Ministre, que vous ayez su l’entendre à votre tour. C’est en effet dans nos territoires que  se situe l’avenir de notre système de santé.
Son organisation devra, demain, être fondée sur les réalités du terrain, en s’appuyant sur les acteurs locaux : eux seuls peuvent comprendre les spécificités de leur territoire. Donnons aux médecins sur le terrain des moyens de coordination. Libérons-les des carcans administratifs. Il est primordial de favoriser une coopération effective de l’ensemble des acteurs. C’est par la coopération que nous
pourrons assurer la meilleure organisation de l’accès aux soins dans nos territoires. Mais avec cette constante : le médecin est le coordonnateur de l’équipe de soins.
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Enfin, il nous faut réellement mettre les nouvelles technologies au cœur de l’accès aux soins. Nous serons à cet égard particulièrement attentifs aux mesures qui découlent des annonces faites à Châlus
par le Premier Ministre vendredi dernier.
La télémédecine n’est en effet pas un simple acte technologique. C’est un acte médical à part entière. Il est donc important de l’intégrer pleinement dans la coordination des soins dans les
territoires. C’est une demande forte des médecins, et l’Ordre publiera prochainement un livre blanc sur la place du médecin et du patient face aux nouvelles technologies en santé. Il devra éclairer votre
action, pour réussir cette intégration.
Il faudra pour y arriver simplifier la réglementation, pour faciliter son usage concret dans le parcours de soins des patients et dans les pratiques quotidiennes des médecins. Mais il faudra également que
l’Etat joue pleinement son rôle de régulateur des offres numériques en santé, dans le respect des principes éthiques et déontologiques. Si l’Etat n’assume pas ses responsabilités, nous courons le risque de voir fleurir des offres marchandes, et de voir s’installer des assureurs complémentaires comme seconde porte d’entrée dans le système de soins.
La République est aujourd’hui trop souvent entravée par la priorité qui est donnée au rééquilibrage économique. Cela la fragilise, car cela ne lui permet plus d’assumer pleinement sa responsabilité de
bientraitance républicaine. La vision que porte l’Ordre au nom des médecins, la vision que nous vous enjoignons de faire vôtre, devra permettre de reconnaître les médecins et les professionnels de
santé comme un des piliers d’une bientraitance républicaine renforcée, au service de nos concitoyens.
L’Ordre sera un partenaire vigilant
Madame la Ministre, reconnaître la mission de service public qu’assume l’ensemble du corps médical sur le territoire ; reconnaître le rôle de pilier de la bientraitance républicaine qui est le leur, et mener à bien les annonces que vous avez faites la semaine dernière, devra nous amener à construire un pacte territorial de santé partout en France. Ce pacte doit permettre dans chaque territoire à tous les
acteurs de s’associer dans un projet de santé. Les médecins libéraux, bien sûr, mais également les
établissements, privés comme publics, les usagers, les élus locaux et l’administration.
C’est ce qui nous fait dire que les mesures annoncées vendredi dernier ne sont aujourd’hui pas suffisantes. Ce plan n’évoque en effet pas le lien ville-hôpital et la situation des spécialistes de
premier recours. Ce sont pourtant des maillons essentiels de l’accès aux soins dans les territoires.
Nous ne réussirons pas à transformer notre système de santé en ne se concentrant que sur les généralistes libéraux. Il faut demain que nous arrivions à une meilleure coopération entre tous les acteurs de la santé : l’oublier, c’est déjà fragiliser la lutte contre les déserts médicaux.
Autre oubliée majeure des annonces récentes : la formation ! Il faut qu’enfin la formation des professionnels permette de rénover notre système de santé. Il faut qu’enfin nous formions les jeunes
médecins dont ont besoin nos territoires. Il faut qu’enfin la formation permette à ces jeunes médecins de construire leur carrière professionnelle sans les enfermer trop tôt dans
l’hyperspécialisation ou des modes d’exercice spécifiques. Or nous répétons les mêmes erreurs depuis des dizaines d’années et les derniers examens classant nationaux le montrent encore. La
création de nouvelles spécialités au détriment de la médecine générale, l’accent mis sur la
surspécialisation enferment les étudiants dans des filières dont ils ne pourront sortir, et ne prennent
pas en compte les besoins des territoires !
Il est capital que les universités se tournent vers leurs territoires, pour encourager la
professionnalisation précoce des étudiants et former les médecins dont nous aurons besoin demain.
La formation doit être un apprentissage de savoir et de techniques médicales, mais aussi de notre environnement professionnel dans son ensemble. Elle doit permettre aux médecins de construire
progressivement leur projet personnel et professionnel. Elle doit également permettre de favoriser l’accès aux soins. Ce lien entre la formation des professionnels et l’organisation de l’accès aux soins
dans les territoires est fondamental.
Cette réflexion, l’Ordre la mène de concert avec les doyens des universités. Il est temps que la gouvernance s’en saisisse pour en faire une priorité.
Cela, nous n’aurons de cesse de le dire : toute réforme du système de santé qui n’intègre pas la formation dans sa construction sera condamnée à échouer. La formation, Madame la Ministre, doit
être érigée au rang de cinquième priorité de la Stratégie nationale de santé que vous présenterez en décembre. L’avenir en dépend.
Vous le voyez, Madame la Ministre, nous resterons pleinement attentifs quant à la mise en œuvre de
ce plan. Nous voulons en savoir plus sur son financement, sur le calendrier, et sur son pilotage : nous
n’accepterons pas un énième plan qui resterait une vaine incantation, un vœu pieux, pour finir oublié
et remplacé dans quelques années.
Nous serons pour vous des partenaires exigeants et vigilants. Car, en l’état, le plan annoncé vendredi
ne saurait servir de viatique pour les cinq ans à venir. Nous avons besoin, pour notre système de
santé, d’une ambition véritable, d’une vision globale du système et de sa projection dans l’avenir.
Au terme d’une année électorale riche en rebondissements, les Français ont fait le double choix du
renouvellement et de la transformation. Cette volonté de renouvellement nous devons tous en tenir
compte. Notre Institution s’est engagée depuis plusieurs mois dans une volonté profonde de
renouveler ses actions, ses méthodes, son écoute des médecins.
2018 verra le renouvellement d’un grand nombre de conseils départementaux, et la modification de
leur composition du fait notamment de l’instauration de la parité.
Nous serons renforcés dans notre action à chaque échelon territorial, dans notre capacité d’écoute
des médecins, au plus près de leur exercice quotidien. Cela renforcera notre centralité comme
interlocuteur des pouvoirs publics.
Nous jouerons à ce titre pleinement notre rôle en alertant nos interlocuteurs de l’urgence à laquelle
nous faisons face aujourd’hui. Car il y a urgence. Il nous faut agir vite, ensemble.
Il y a aujourd’hui urgence
Comme vous le rappeliez il y a quelques semaines devant l’Assemblée nationale, vous avez passé 25
ans de votre vie dans les hôpitaux. L’urgence, vous la connaissez donc, et tous les acteurs de notre
système de santé aussi.
La situation se dégrade, et les Français en ont conscience, qui sont témoins de dysfonctionnements
graves.
• Dysfonctionnements graves dans l’accès aux soins, alors que l’Atlas 2017 de la démographie
médicale publié la semaine dernière montrait que la définition de zones déficitaires ARS, et
les mesures liées à ce zonage, n’ont eu aucun impact.
• Dysfonctionnements graves aussi dans l’information des usagers, dont la gestion du cas
Levothyrox par l’ANSM est une illustration tristement éloquente. Elle nous interroge : que ce
serait-il passé en cas de grave crise sanitaire ? Comment accepter une si grave impéritie des
autorités sanitaires ?
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• Dysfonctionnements, enfin, dans la gouvernance, qui est trop souvent source de confusion
plutôt que de clarté. A cet égard, nous sommes surpris de voir évoquée une révision de la loi
sur la fin de vie, moins de deux ans après la promulgation d’une loi équilibrée, fruit d’un large
consensus. Je le dis de but en blanc : l’Ordre des médecins ne comprendrait pas que l’on
laisse s’instaurer de nouveau un flou sur ce sujet si grave, si peu de temps après l’adoption
de cette loi à la conception de laquelle nous avons pris part.
La situation se dégrade, alors même que de nouveaux acteurs assurantiels et mutualistes se
renforcent et pourraient venir concurrencer l’Assurance maladie, à laquelle les Français comme leurs
médecins sont pourtant attachés. Nous voulons réaffirmer aujourd’hui avec force que, pour nous,
l’entrée dans le système de soins devra continuer de se faire par l’Assurance maladie.
Le diagnostic d’un système qui va en se dégradant, qui ne répond plus aux attentes et aux besoins
des patients et de leurs médecins, est aujourd’hui établi et partagé. Madame la Ministre, c’est sur ce
point précis que la campagne électorale et les premiers mois du nouveau gouvernement nous ont
laissé sceptique : partagez-vous avec nous l’urgence d’agir ? Partagez-vous avec les médecins comme
avec les patients le sentiment que le système est à bout de souffle ?
Vous comprendrez l’exigence et la vigilance dont nous ferons preuve dans les mois et les années à
venir. Car si l’on ne partageait pas aujourd’hui ce sentiment d’urgence, nous nous contenterions de
trop peu. Nous perdrions encore cinq ans. Mais dans cinq ans il sera trop tard !
Or dans les engagements du Président de la République, le renouvellement allait de pair avec la
transformation. Le Président de la République a l’ambition de transformer la France. Nous ne
pouvons pas croire qu’il n’ait pas également l’ambition de transformer en profondeur notre système
de santé, qui est notre patrimoine commun. Nous ne pouvons pas croire que la santé soit l’oubliée
de cette volonté transformatrice.
Si nous ne la mettons pas en œuvre dès aujourd’hui, nous mettrons définitivement en péril notre
système de santé. Car la société, elle, ne cessera pas d’évoluer : le vieillissement, le développement
des maladies chroniques, la métropolisation aussi, sont autant de défis qui exigent de nous une
vision claire et courageuse pour créer le système de santé de demain.
Il nous faut construire un système de santé qui s’adapte à ces bouleversements, et non plus attendre
des médecins qu’ils portent seuls le poids d’un système devenu anachronique.
Il faut aujourd’hui créer le système de santé de demain, et ne pas se contenter de colmater celui
d’hier.
Seule une véritable réforme du système de santé, que nous appelons de nos vœux, pourra permettre
d’apporter des réponses fortes à la souffrance des médecins, qui ne se retrouvent plus dans le
système actuel.
Car je ne pourrais terminer ce discours, Madame la Ministre, sans évoquer devant vous la souffrance
de nos confrères. Plus que tout, c’est cette souffrance partout ressentie qui doit nous obliger à
mener cette réforme.
Un préalable indispensable : apporter des réponses fortes à la souffrance des médecins
En 2015 déjà, la grande consultation avait montré le désarroi du corps médical face aux réalités de
l’exercice quotidien, et leur pessimisme pour l’avenir de la profession. Cette souffrance a aujourd’hui
atteint un point de non-retour. La grève récente de nos confrères hospitaliers en est un des derniers
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témoignages. Cette souffrance, Madame la Ministre, nous sommes convaincus que vous la
connaissez, que vous en avez été témoin.
Les raisons en sont multiples. Un exercice cloisonné, hyper-administré, d’abord, qui obère le temps
médical. La première revendication des médecins est celle-là : redonnez nous du temps médical. Les
médecins ont choisi ce métier pour soigner ; il faut le leur permettre ! Il faut leur permettre de
travailler autrement, plus efficacement, en les sortant de leur isolement.
Il nous faut aller dans cette voie, justement pour redonner du sens au métier que nous exerçons.
Vous le savez, notre profession est particulièrement exposée au mal-être et aux risques de burn out.
Cela touche également les internes, comme l’ont démontré les études sur la santé des jeunes
médecins publiées par l’Ordre des médecins puis par les syndicats de jeunes médecins.
Il est aujourd’hui primordial de poser les fondations d’une nouvelle pratique médicale, plus mobile,
plus évolutive, qui permette vraiment aux médecins de bâtir leurs carrières. Si le système de santé,
demain, n’équilibre pas mieux les statuts et les fonctionnements pour renforcer les coopérations
inter et intra-professionnelles, les médecins ne seront plus en mesure de porter notre système de
santé, comme ils le font encore aujourd’hui.
Il faut également mieux protéger nos confrères. Un nombre trop important d’entre eux sont
victimes, trop régulièrement, d’agressions violentes, parfois fatales. Tous nos confrères sont exposés,
libéraux comme hospitaliers et salariés, ruraux comme urbains.
Notre profession, Madame la Ministre, a le sentiment que ces drames trop fréquents, que ce
désespoir pourtant si visible, ne sont pas entendus. Qu’aucune réponse n’y a été apportée par les
pouvoirs publics.
Cela ne peut plus durer.
Aujourd’hui, les professionnels de santé doivent être reconnus dans leur rôle au cœur de notre
République.
Aujourd’hui, ils doivent pouvoir pleinement exercer le métier pour lequel ils ont été formés.
Aujourd’hui, ils doivent être enfin protégés, pour mieux protéger leurs patients.
C’est la responsabilité des pouvoirs publics.
Conclusion
Madame la Ministre, nous saluons en vous la Ministre de la Santé qui porte enfin une analyse
nouvelle, enfin fondée sur les territoires, sur la proximité et sur la coordination, loin de
l’hypercentralisation et des carcans administratifs qui sclérosent aujourd’hui notre système de santé.
Alors que le Gouvernement est au pouvoir depuis quelques mois, alors que vous avez devant vous
plusieurs années pour agir, les professionnels de santé attendent de leur ministre de tutelle qu’elle
engage les réformes du système de santé en prenant en compte les manques que j’ai évoqués, et
qu’elle redonne aux médecins toute leur place au cœur d’un système de santé refondé pour faire
face au monde de demain.
L’Ordre porte depuis deux ans leurs attentes. C’est aujourd’hui au Gouvernement de prendre ses
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Nous serons si c’est le cas un partenaire engagé et exigeant :
Pour réformer, pour transformer, nous répondrons présents.
Pour tracer les perspectives d’avenir, de long terme pour notre système de santé, nous prendrons
nos responsabilités.
Pour dessiner les contours d’un exercice médical plus valorisant, plus mobile et plus pertinent, les
médecins ont des propositions.
Ils attendent de retrouver leur place au centre de notre système de santé.
Il faudra plus que des mots pour redonner confiance au monde de la santé.
Plus que de discours, c’est une vision, ce sont des actions, que nous attendons.
Vous avez la parole madame La Ministre…,

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