Génériques: excipients, attention prudence!

Par LEXPRESS.fr , publié le

Dr Sauveur Boukris dans son cabinet m?dical dans le 18?me ? Paris.

Dr Sauveur Boukris dans son cabinet médical dans le 18ème ? Paris.

JPGuilloteau/L’Express

Dans son livre, le Dr Boukris dresse une liste non exhaustive des excipients contenus dans certains génériques, et susceptibles de provoquer des effets secondaires. Extraits.

Excipients, mode d’emploi

Les excipients désignent toutes les substances autres que le principe actif. Ils donnent la consistance, le goût, la couleur du médicament. Ce sont des substances chimiques dans lesquelles on incorpore un principe actif pour permettre sa mise en forme galénique – comprimé, gélule, etc. Les génériques peuvent avoir des excipients différents de la spécialité de référence, ou des excipients identiques mais à concentration différente.

Or, il existe des excipients à effet notoire, c’est-à-dire susceptibles d’entraîner des effets secondaires – allergie, intolérance au gluten, etc. – et pouvant nécessiter des précautions d’emploi chez certains patients. Depuis la création du Répertoire des génériques, en 1999, les excipients à effet notoire sont mentionnés en regard des spécialités, de référence ou de génériques, qui en contiennent. En annexe dudit répertoire, ils sont regroupés avec différents renseignements, les effets entraînés, et les populations potentiellement sensibles.

Quelques exemples…

Pour l’Aténolol, comprimé dosé à 100 mg, la spécialité de référence, la Ténormine®, est dénuée d’excipients à effet notoire ; en revanche, il existe des génériques de la Ténormine® qui ont des EEN, en particulier l’Aténolol des laboratoires Arrow, EG, Sandoz, Teva et Zydus, qui contiennent du lactose.

Pour la Diosmine 300, il existe dix-sept génériques différents. Seul celui élaboré par les laboratoires Sciencex est identique au princeps. Quatorze génériques possèdent un seul EEN – du lactose -,un en a deux – lactose et rouge cochenille A -, et deux génériques – ceux de Dexo et Socopharm – possèdent cinq EEN – aspartam, fructose, jaune orangé S, maltodextrine et saccharose.

(…) L’Efferalgan® contient de la cellulose, de la povidone, du stéarate de magnésium, de l’hypromellose et du béhénate de glycérol. Le paracétamol Biogaran, lui, contient de la silice colloïdale, du talc, de la gélatine, de l’érythrosine, du bleu patenté V, du jaune de quinoléine et du dioxyde de titane. Ce générique a provoqué des réactions allergiques chez certains malades.

Autre exemple : le Corvasal®. Il contient de la crospovidone, du macrogol 6000 et du lactose. Son générique contient de la silice colloïdale, de l’amidon de maïs, de l’hypromellose, du mannitol, de l’eau, du lactose, du jaune de quinoléine, du rouge cochenille, et du jaune orangé S. Un patient a présenté une toxémie sous ce générique.

Le Zyloric® est vendu en comprimés, le générique Allopurinol Bayer en capsules, ils ont cependant le même principe actif. Quand on y regarde de plus près, les excipients du Zyloric® comprimé sont le lactose, la povidone, le stéarate de magnésium et l’amidon de maïs. En revanche, les excipients du générique sont la cire d’abeille, l’huile de soja, l’huile d’arachide, des huiles végétales, la lécithine de soja, la gélatine, l’Anidrisorb 85/70, le sorbitol, le dioxyde de titane et l’oxyde de fer jaune.

Une patiente prenait du Diamicron® 80 mg – principe actif, leGliclazide -, avec les excipients suivants : bénéhate de glycéryle, povidone, silice colloïdale anhydre, stéarate de magnésium, depuis plusieurs mois. Son diabète était bien équilibré. Son traitement a été substitué par du Gliclazide 80 mg Merck, présentant la même composition qualitative que celle du princeps mais une proportion différente des excipients. La patiente s’est aperçue quelque temps plus tard que le comprimé ressortait intact dans ses selles. La mesure de la glycémie montrait un déséquilibre du diabète avec une glycémie à 3 g/l, et l’on a arrêté le générique au profit du princeps. Il s’est ensuivi un retour à la normale de la glycémie. En maintenant le générique, cette patiente aurait été exposée aux complications de l’hyperglycémie – cardiaques,rénales, etc.

Une femme de soixante-dix-sept ans, hypertendue, traitée avecIsoptine® LP 240 – Vérapamil, excipients et enrobage : alginate de sodium, povidone, stéarate de magnésium, eau purifiée, hypromellose, macrogol 400, macrogol 6000, jaune de quinoléine, indigotine, cire Hoechst E -, à raison de deux comprimés par jour, avait une pression artérielle équilibrée. Il y a eu substitution par du Vérapamil LP 240 mg Biogaran, c’est-à-dire du Vérapamil dont les excipients sont : Polysorbate 80, Eudragit E 30D, saccharose stéarate, diméticone, gélatine, oxyde de fer jaune (E172), oxyde de fer noir (E172), érythrosine (E127). Après quinze jours de traitement, la patiente présentait une tension artérielle systolique de 18 cm Hg. L’arrêt du générique suivi de la reprise du princeps a permis le retour à la normale de la pression artérielle à 13/7.

Un homme de soixante-seize ans était traité pour une hypertension artérielle par Hytacand® 16/12,5 et Mono-tildiem® LP 300 – Diltiazem, excipients : cellulose microcristalline, éthylcellulose, carmellose sodique, cellulose microcristalline, copolymères d’esters acryliques et méthacryliques, mono-glycérides diacetylés, stéarate de magnésium, oxyde de fer rouge (E172). Sa pression artérielle était équilibrée à 15/9. Le Diltiazem LP 300 Bayer – Diltiazem, excipients : talc, huile de ricin, Povidone K30, amidon de maîs, saccharose – a été substitué au Mono-tildiem® : la pression artérielle mesurée à plusieurs reprises est montée à 17/10. Après un mois de traitement, le patient a repris le médicament princeps, la pression artérielle est alors revenue aux valeurs antérieures.

Un homme de soixante-cinq ans présentant une colopathie fonctionnelle prenait de temps en temps et simultanément deux gélules de Duspatalin® 200 – Mébévérine, excipients : Eudragit E 30D et L 30D, stéarate de magnésium, talc, hypromellose, triacétate de glycéryle, gélatine, dioxyde de titane (E171). Ce patient prenait par ailleurs de manière chronique : Corvasal® (Molsidomine), Unicordium® (Bepridil), Amlor® (Amlodipine), Plavix® (Clopidogrel) et Tahor® (Atorvastatine). La prise conjointe du Duspatalin® et du Corvasal® était bien tolérée. Mais la prise ultérieure de deux gélules de Mébévérine 200 mg Biogaran – Mébévérine, excipients : cire d’abeille jaune, huile de soja hydrogénée, huile d’arachide, lécithine de soja, gélatine, oxyde de fer jaune (E172), oxyde de fer rouge (E172) -, associées au comprimé de Corvasal, a conduit à une chute de tension orthostatique majeure durant deux heures. Le risque, c’est la chute, et la possibilité de fracture, surtout chez les personnes âgées.

Le lendemain, un effet similaire mais moindre était constaté avec l’association d’une seule gélule de Mébévérine 200 mg Biogaran au Corvasal®. Le problème vient de la différence de forme galénique du princeps et du générique. Le Duspatalin® est libéré dans l’estomac, et pour partie dans l’intestin grêle, alors que le générique libère davantage de Mébévérine qui, associée à la Molsidomine, sur ce terrain vasculaire avec de nombreux vasodilatateurs, conduit à une hypotension marquée.

(source : extraits de « Génériques, la grande arnaque », Editions du Moment, par le Dr Sauveur Boukris)

Vous aimerez aussi...