Vers qui les patients victimes d’effets secondaires du Lévothyrox peuvent-ils encore se tourner pour connaître le fin mot de l’histoire concernant la nouvelle formule du Lévothyrox® ?

Reçues par Agnès Buzyn, Ministre de la Santé et de la Solidarité Nationale, la semaine dernière, les associations Vivre Sans Thyroïde (VST) et L’Association Française des Malades de la Thyroïde (AFMT), soucieuses de faire toute la lumière sur cette affaire d’effets secondaires imputés à la nouvelle formule du médicament du laboratoire Merck, ont pu obtenir quelques éléments de réponses à leurs interrogations.

Mais tout n’est pas encore réglé.

Le recours à un générique de l’ancienne formule du Lévothyrox évoqué

« Merck ne reviendra pas à l’ancienne formule. Mais la ministre nous a promis qu’il existe une similaire à celle de Merck en version générique et avec du lactose. Cette fameuse formule est produite par un laboratoire Hollandais qui appartient au groupe pharmaceutique Mylan. Il s’agit du copié-collé de l’ancienne formulation nous a assuré la ministre », explique Chantale L’Hoir, présidente de l’AFMT

L’association a donc demandé son déblocage immédiat. Réponse de la ministre de la Santé : « elle nous affirme qu’il y a un temps minimum de 4 semaines d’attente pour que des produits de santé vendus dans le nord de l’Europe obtiennent les normes AMM et ISO françaises, précise la présidente de l’association. Ce n’est pas possible, il y a une urgence sanitaire. Cette situation doit être réglée dans les 15 jours. »

Gouttes de L-Thyroxine SERB : une alternative médicamenteuse envisagée

Pour L’Association Française des Malades de la Thyroïde, il est indispensable de ne pas limiter aux enfants et aux personnes âgées avec des problèmes de déglutition seuls la prise des gouttes de L-Thyroxine (la version liquide du Lévothyrox ancienne formule produite par le laboratoire SERB), mais de l’étendre aux personnes fragiles.

Problème : les autorités de santé craignent une pénurie. Pourtant, selon les informations du Figaro*, le fabricant aurait la capacité de doubler sa production.

De son côté, l’association Vivre Sans Thyroïde demande, via une lettre adressée à Agnès Buzyn et Dominique Martin, président de l’Agence Nationale de Sécurité des Produits de Santé et du Médicament (ANSM) publiée sur son site le 12 septembre** dernier, qu' »une information claire sur les capacités de production et d’augmentation des quantités du laboratoire SERB, sur le stock qui sera mis sur le marché ainsi que sur les délais » soit donnée.

Mais aussi qu’une note d’information « avec une consigne de prescription claire » du médicament soit produite « au plus vite » pour les médecins.

Les données de pharmacovigilance de l’ancienne formule du Lévothyrox exigées par les associations

Afin d’être informée « de l’étendue des signalements avant le changement de formule », VST dit vouloir consulter les données de pharmacovigilance de l’ancienne formule du Lévothyrox. Elle exige également que lui « soit communiqué le dossier complet de bioéquivalence, y compris les études de stabilité qui ont mené à la mise sur le marché de la nouvelle formule ».

De même, elle réclame que ce dossier vulgarisé et rendu public « pour répondre à l’inquiétude des patients. »

Le manque d’information des professionnels de santé et patients pointé du doigt

La ministre de la santé l’avait elle-même reconnu : il y a eu un manque d’information sur la nouvelle formule du Lévothyrox.

Ainsi, Vivre Sans Thyroïde met à disposition des « guidelines »*** pour accompagner les patients sur la marche à suivre en cas d’effets secondaires. Dans le même temps, elle réclame que des consignes claires, qui « doivent prendre en compte les symptômes et inquiétudes des patients », soient données aux professionnels de santé.

Une façon de démêler le vrai du faux et d’éviter « la circulation de rumeurs et de fausses nouvelles » précise-t-elle. Les réseaux sociaux étant souvent les premiers canaux de désinformation sur ces sujets.

De son côté, l’AFMT estime que l’ANSM est entièrement responsable de cette faille et réclame la démission de son président, Dominique Martin. « Il n’a pas été à la hauteur. Lorsque l’on a une responsabilité de ce niveau, on ne peut pas se permettre de faire n’importe quoi », s’insurge Chantal L’Hoir.

L’urgence : prévenir l’arrêt des traitements et le trafic de médicaments

Car ce qui inquiète certainement les associations, c’est la multiplication des témoignages de patients prêts à stopper leur traitement, incitant –volontairement ou non- les autres à faire de même.

« Actuellement nous sommes dans le cas de figure où des gens se sentent mieux en arrêtant leur traitement pendant quelques jours et c’est triste à dire mais il ne faut pas, alerte Chantale L’Hoir. Vous avez mal au ventre, mal partout, mais il ne faut pas arrêter de prendre son traitement. Le cœur est une pompe qui fait circuler le sang, et celle-ci est mise en route par les hormones thyroïdiennes qui gèrent ses battements. Si on se retrouve en hypothyroïdie, on risque d’accumuler des déchets dans le sang et de faire un AVC. C’est très grave ».

Selon elle, le risque à « laisser pourrir cette situation » pose également le problème du trafic de médicaments. En effet, de nombreux patients, démunis face à la situation, sont prêts à aller chercher des solutions à l’étranger ou sur Internet et à les proposer à d’autres, sans vraiment savoir ce qu’ils achètent et consomment.

Une réunion d’information et une marche blanche à venir

Motivées par une même cause, défendre les intérêts des personnes atteintes de troubles thyroïdiens, les deux associations souhaitent mettre en place des événements pour continuer à les soutenir et les informer.

Ainsi, l’association Vivre Sans Thyroïde organise une réunion d’information**** à l’Hôpital de la Conception (AP-HM) de Marseille le 13 septembre 2017 en présence des professeurs Frédéric Sebag, Frédéric Castinetti et David Taieb.

L’Association Française des Malades de la Thyroïde souhaite organiser prochainement « une marche blanche de tous les scandales sanitaires ».

Le but ? Continuer de se battre et encourager les citoyens à exercer leur droit à la santé. Pour Chantale L’Hoir, c’est certain : il s’agit « d’un acquis social que l’on doit continuer de protéger ». Et d’ajouter « les gens doivent comprendre que l’on peut faire changer les choses. C’est un mouvement pour en découdre avec les injustices sanitaires que l’on subit.