Contrôle de l’origine des médicaments importés en France

14e législature

Question écrite n° 08875 de Mme Catherine Procaccia (Val-de-Marne – UMP)

publiée dans le JO Sénat du 24/10/2013 – page 3056

Mme Catherine Procaccia attire l’attention de Mme la ministre des affaires sociales et de la santé sur le manque de contrôle des médicaments importés en France.

La pharmacovigilance opère plusieurs vérifications portant sur la composition, les conditions de fabrication, de conservation et de distribution des médicaments afin de délivrer une autorisation de vente et de mise sur le marché. Cette étape est fondamentale en termes de santé publique puisque la France achète chaque année pour plusieurs milliards d’euros de médicaments (234,1 milliards en 2010 selon l’Institut national de la statistique et des études économiques -INSEE-).

Selon un rapport de l’Académie nationale de médecine publié en février 2012, 80 % des principes actifs des médicaments vendus dans l’Union européenne proviennent de l’espace économique non-européen alors que l’Europe fabriquait en grande partie ses propres médicaments dans les années 1990. Le cas du paracétamol, qui a disparu des chaînes de production du vieux continent alors qu’il est l’un des principes actifs les plus consommés, illustre cette nouvelle situation.

Actuellement, une délocalisation vers l’Asie place la Chine et l’Inde en tête du classement de la production de médicaments. À ce titre, le rapport souligne de sérieuses lacunes en termes de traçabilité des produits de santé importés en Europe notamment sur l’opacité d’origine des principes actifs et de leurs conditions de collecte. Par exemple, en 2010, l’ex-Afssaps, devenue l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) n’a contrôlé que 85 sites de production basés hors de France sur 896 inspections concernant l’ensemble des médicaments (princeps et génériques). Selon les chiffres officiels de l’Union européenne, sur 20 certificats de qualité de standards européens retirés en 2010, 15 d’entre eux concernaient des médicaments venus, précisément, d’Inde ou de Chine.

Alors que le Parlement européen vient d’adopter de nouvelles règles en faveur de la pharmacovigilance avec notamment une harmonisation de la procédure d’urgence automatique qui entrera en vigueur en 2013, elle voudrait savoir ce qu’elle compte faire pour inciter les industriels à certifier leurs produits pharmaceutiques notamment lors de l’entrée des matières premières dans les usines et du conditionnement au sein des pays émergents, y compris au sein des autres pays membres de l’Union européenne.

Elle aimerait également savoir si, dans un souci de transparence envers tous les acteurs de santé, elle compte proposer des mesures incitant à inscrire sur les boîtes l’origine du pays de fabrication. Si l’industrie du médicament répond à des mécanismes d’offres industrielles, il n’en demeure pas moins indispensable d’adapter notre système de pharmacovigilance à la mondialisation de cette production.

Transmise au Ministère des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes

Réponse du Ministère des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes

publiée dans le JO Sénat du 11/06/2015 – page 1381

Tout médicament doit faire l’objet, conformément aux dispositions de l’article L. 5121-8 du code de la santé publique, avant sa commercialisation, d’une autorisation de mise sur le marché (AMM) octroyée selon une procédure européenne ou nationale et selon des exigences en termes d’efficacité, de qualité et de sécurité imposées par la directive 2001/83/CE du Parlement européen et du conseil du 6 novembre 2001 instituant un code communautaire relatif aux médicaments à usage humain. S’agissant plus particulièrement des modalités de fabrication des médicaments, la directive 2001/83/CE précitée n’impose pas une fabrication en France ou en Europe. Toutefois, un médicament destiné au marché européen et fabriqué en dehors de l’Union européenne, ne peut être autorisé et commercialisé en Europe que si le site qui le produit a été inspecté pour garantir la fabrication selon les bonnes pratiques de fabrication (BPF), inspection qui se traduit par la délivrance d’un certificat BPF. Dans ce contexte, la coopération européenne et internationale occupe une place importante compte tenu des enjeux de santé publique qui en découlent. L’agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) et ses homologues européens et internationaux cherchent donc à coordonner leurs actions d’inspection et à optimiser leurs ressources afin de s’assurer que les produits qu’ils encadrent sont sûrs et efficaces. L’ANSM suit ainsi un programme d’inspection qui prend en compte ce phénomène de délocalisation. Des inspections sont également menées conjointement sur les sites les plus lointains, et les informations sur les résultats des inspections sont régulièrement échangées. Une mutualisation des résultats des inspections est réalisée via une base de données européenne qui contient tous les certificats BPF délivrés par les autorités nationales de régulation concernées, y compris pour des inspections extracommunautaires. La qualité des matières premières doit également répondre aux exigences de la directive 2001/83/CE précitée. La démonstration de la conformité à ces exigences fait l’objet d’une évaluation réalisée soit par l’ANSM ou ses homologues européens, soit par la direction européenne de la qualité du médicament (DEQM) du Conseil de l’Europe dans le cadre de l’octroi de certificat de conformité à la pharmacopée européenne (CEP), valable pour toutes les AMM des médicaments composés de ces substances mis sur le marché de l’Union européenne (UE). La directive 2011/62/UE du 8 juin 2011 modifiant la directive 2001/83/CE, en ce qui concerne la prévention de l’introduction dans la chaîne d’approvisionnement légale de médicaments falsifiés, transposée par l’ordonnance du 19 décembre et son décret d’application du 31 décembre 2012 est venue renforcer les exigences de vérification applicables aux fabricants de médicaments. Ces nouvelles dispositions visent à renforcer la qualité et la sécurité de la chaîne d’approvisionnement tant des matières premières que des produits finis. En ce sens, elle impose notamment aux fabricants de médicaments l’utilisation, comme matière première, de substances actives fabriquées et distribuées conformément aux BPF ainsi que la réalisation d’audits sur les sites de fabrication et de distribution des substances actives entrant dans la composition de leurs médicaments. De même, le fabricant doit veiller à ce que les excipients soient appropriés pour une utilisation dans des médicaments, sur la base d’une évaluation formalisée du risque. En cas de falsification ou de suspicion de falsification de médicament, le fabricant doit en informer immédiatement l’ANSM. Elle introduit également l’obligation pour les États membres de prendre les mesures nécessaires, y compris au moyen d’inspections effectuées à une fréquence basée sur le risque, pour s’assurer que la fabrication, l’importation et la distribution de substances actives et de médicaments sont conformes aux bonnes pratiques de fabrication et de distribution. Par ailleurs, la directive organise la mise en place d’un dispositif de sécurité innovant en deux volets. D’une part, un volet relatif aux mentions devant figurer sur l’étiquetage permettant de garantir l’identification et l’authentification, c’est-à-dire la traçabilité du médicament, d’autre part, un volet relatif au dispositif antieffraction, élément « physique » visant à garantir l’intégralité de l’emballage. Enfin, l’ANSM conduit un programme annuel de prélèvements sur site en France et dans les pays tiers pour réaliser des analyses dans ses laboratoires. Dans ce cadre, l’ANSM contrôle chaque année plusieurs centaines de médicaments et une centaine de matières premières. Ces contrôles sont réalisés selon des enquêtes programmées (après une analyse du risque) ou en cas de suspicion de défaut de qualité suite à un signalement. Les contrôles en laboratoire portent sur des produits représentatifs du marché (générique ou non), qu’ils soient ou non fabriqués en France ou en Europe et portent principalement sur l’identification et le dosage du principe actif, ainsi que sur sa pureté. Une attention particulière est toutefois portée sur les médicaments ayant une autorisation d’importation parallèle ainsi que sur les produits susceptibles d’être falsifiés. Les laboratoires de l’ANSM participent également aux programmes de contrôle européens coordonnés par les laboratoires officiels de contrôle des médicaments, portant sur les médicaments ayant une AMM européenne. Dans le cadre du conseil stratégique des industries de santé (CSIS), le Gouvernement et les industriels étudient la possibilité de faire figurer sur le conditionnement des médicaments un pictogramme indiquant la zone géographique dans laquelle ont été réalisées les principales phases de fabrication des médicaments (matière première, fabrication, conditionnement). L’apposition d’un tel pictogramme devra être soumise à l’approbation des autorités européennes. En effet, s’agissant plus particulièrement du conditionnement des médicaments et des logos qui y sont apposés, la directive 2001/83/CE précitée énumère les mentions devant obligatoirement figurer sur l’emballage extérieur du médicament. Toutefois, l’article 57 de cette même directive permet aux États membres d’imposer d’autres mentions sur l’emballage extérieur, notamment des mentions relatives aux prix ou modalités de remboursement, et l’article 62 ouvre la possibilité d’apposer sur cet emballage des informations compatibles avec le résumé des caractéristiques du produit, utiles pour le patient, à l’exclusion de tout élément pouvant présenter un caractère promotionnel.

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