Irradiés de l’Île Longue : procès en appel à Rennes sur le cas d’un chaudronnier décédé d’un cancer
L’audience s’est tenue ce mercredi à la Cour d’appel de Rennes, suite à la décision du ministre de la Justice de faire appel de la décision du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de Brest de mars 2017. Le TASS avait reconnu l’exposition aux radiations comme cause du décès d’un ancien ouvrier.
Durant 29 ans, entre 1974 et 2003, un chaudronnier qui travaillait dans les ateliers de l’île a été exposé aux rayons ionisants.
Suite à cette exposition de longue durée dans sa carrière professionnelle, il est décédé d’un cancer de l’œsophage le 3 octobre 2010. Il avait 57 ans.
Sa famille et ses anciens collègues, aidés par l’association Henri Pézerat, avaient décidé de faire reconnaître ce décès comme découlant de son travail, exposé aux rayons ionisants.
Un premier procès en mars 2017
En mars 2017, le TASS de Brest avait jugé « que le cancer de l’oesophage qui a entraîné le décès de Mr——— est en lien direct et essentiel avec une exposition professionnelle habituelle avec des rayonnements ionisants et avec d’autres agents cancérigènes et doit être pris en charge au titre de l’article L.461-1 de la Sécurité Sociale«
Cette décision du TASS avait été motivé par les arguments scientifiques d’Annie Thebaud-Mony, directrice de recherche honoraire à l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM).
Ses travaux ont prouvé au tribunal que « le cancer de l’oesophage fait partie des maladies radio-induites inscrites dans la liste américaine des maladies professionnelles radio-induites et dans celle relative à la reconnaissance et à l’indemnisation des victimes des essais nucléaires français » selon le communiqué de l’association Henri Pézerat.
Un procès en appel ce 12 décembre
Mais la partie n’était pas gagnée pour autant. Le Ministère de la Défense a fait appel de la décision du TASS de Brest.
Ce procès en appel s’est déroulé ce mercredi 12 décembre au matin. Face à l’absence de l’avocat de la Défense qui a laissé son dossier tel une plaidoirie écrite, l’audience s’est déroulée en accéléré. L’avocate de l’association a toutefois plaidé. La décision de la Cour d’appel a été mise en délibéré jusqu’au 30 janvier 2019.
Loin d’être un cas isolé
La bataille judiciaire continue. Depuis plusieurs années déjà, les anciens ouvriers ayant contracté des maladies graves tels cancers et lymphomes suspectent l’exposition aux radiations comme cause de leurs maladies.
L’Île Longue, en rade de Brest, accueille la base secrète des sous-marins nucléaires lanceurs d’engins de la Marine Française. Les missiles destinés à armer les sous-marins étaient entreposés sur place, exposant de fait les ouvriers aux rayons ionisants.
Dans la lutte pour la reconnaissance de ces problèmes de santé comme maladies professionnelles, les anciens ouvriers ont pu compter sur l’association Henri Pézerat. Cette dernière se définit comme une association qui « a pour but de créer et de faire vivre un réseau d’échanges d’expérience et d’aide aux luttes sociales concernant la santé des personnes en lien avec le travail et l’environnement. »
Elle les soutient dans leurs démarches judiciaires. Cela a payé en 2016, 13 anciens ouvriers ont reçu des indemnités.