« Affaire LÉVOTHYROX® ». Le « ressenti du patient » réhabilité par la HAS : il est un des critères d’évaluation du traitement

Et voilà, peut-être, une reconnaissance que certains patients attendaient depuis un certain temps dans notamment l’« affaire LÉVOTHYROX® ». Cet aveu émane d’une autorité ad hoc.Ce mardi 19 mars 2019, la Haute autorité de santé (HAS) vient réhabiliter le« ressenti du patient ». Ce dernier est appréhendé comme étant l’un des critères d’évaluation du rapport bénéfice/risque du traitement. Il est considéré comme étant un« point majeur » lors de la décision thérapeutique et le suivi du traitement. La parole des patients doit être prise en compte. L’équilibre est rétabli au sein de ce colloque singulier qui caractérise la relation, asymétrique, entre le médecin et le patient. L’invitation à un dialogue de qualité est claire. Et cette intervention de la HAS rappelle aux professionnels de santé leurs devoirs tout en interrogeant les recommandations actuelles concernant la prise en charge des troubles thyroïdiens.En effet, dans un Communiqué de presse daté d’aujourd’hui, la HAS publie un document intitulé : « Hypothyroïdie : 10 messages courts pour promouvoir des traitements utiles et adaptés ». Dans ce document, elle constate que « le diagnostic et le traitement des patients restent à améliorer ». Elle rappelle « dix points clefs d’une prise en charge pertinente des patients atteints d’hypothyroïdie ». Et surtout, elle souligne « l’importance d’instaurer un réel dialogue avec le patient pour prendre en compte son ressenti, ses symptômes ainsi que ses données cliniques et biologiques ». Relevons que ce « ressenti » occupe la première place de cette citation. De même, ce travail de la HAS invite les professionnels de santé, et notamment les médecins généralistes et les endocrinologues, à « renforcer leurs connaissances sur l’hypothyroïdie » et à « améliorer le dialogue avec les patients pour choisir avec eux les examens et les traitements les mieux indiqués dans leur cas ». Il s’agit bien d’une personnalisation du traitement et de son adaptation au cas par cas. Ce qui nous éloigne de la classique approche générale fondée sur un raisonnement statistique au niveau de la population. Le médecin « instaure avec son patient un dialogue de qualité » insiste la HAS.Par ailleurs, des recommandations « complètes » sur les dysthyroïdies sont en préparation selon ce Communiqué. Curieusement, la HAS envisage de puiser ses sources notamment dans les recommandations établies, en Grande-Bretagne, par leNICE (The National Institue for Health and Care Excellence). Ce qui pourrait laisser croire que, en France, ces recommandations seraient inexistantes, incomplètes, inopérantes, ou de mauvaise qualité ?Enfin, la HAS vient ainsi confirmer nos écritures précédentes dont voici un extrait (un exemple) :« Un médicament peut rendre service aux patients (rapport bénéfice/risque favorable) alors que son mécanisme d’action (c’est-à-dire comment il agit) n’est pas connu.À l’inverse, un mécanisme d’action, aussi séduisant soit-il, peut donner naissance à un médicament sans intérêt clinique, voire à un médicament dangereux (rapport bénéfice/risque défavorable).Donc, une formule peut être fabriquée de façon parfaite. Et en même temps, elle pourrait ne pas convenir à certains patients. Sans pour autant pouvoir expliquer ce fait.Les données de la recherche ne sont pas toujours totalement transposables à tous les Hommes (femmes et hommes).L’évaluation d’un médicament ne se fait réellement que lors de la pratique clinique. Ce qui compte avant tout, c’est l’effet du médicament chez le patient : son bénéfice, et ses risques éventuels.Tous les effets indésirables ne pourraient nécessairement trouver une explication. Alors, écoutons et entendons la souffrance exprimée par les patients. »

CTIAP Centre Hospitalier de Cholet

Umlil AMINE, pharmacien et responsable du service de pharmacologie de Cholet

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