Autisme : un chercheur récompensé pour ses travaux sur les altérations sensorielles

Par Coralie Lemke le 04.12.2019 à 10h26

Le Dr Andreas Frick, directeur de recherche au Neurocentre Magendie de Bordeaux, vient d’être primé par le Prix Marcel Dassault pour ses travaux sur l’autisme.

Autisme

90% des personnes autistes présentent des troubles sensoriels.MARTIN BUREAU / AFP

Les gouttes d’eau qui tombent du robinet sur le lavabo, un motif de tapisserie aux couleurs criardes ou encore le contact d’un simple vêtement sur la peau. Tous ces éléments, qui semblent anodins, peuvent représenter une agression et être source d’un profond malêtre chez les personnes autistes. « Plus de 90% des personnes autistes présentent ces troubles sensoriels, qui peuvent se manifester de façon visuelle, auditive ou encore tactile« , explique Marion Leboyer, directrice de la fondation Fondamental, spécialisée dans les maladies mentales. En plus de ces troubles sensoriels, les autres critères de détection sont un déficit d’interaction sociale ainsi que des activités restreintes et répétitives. 

Aucun traitement pharmaceutique ciblant les troubles du spectre autistique n’existe pour le moment sur le marché. Voilà pourquoi la recherche tente de trouver de nouvelles pistes à explorer. Le Dr Andreas Frick, directeur de recherche au Neurocentre Magendie de Bordeaux, vient d’être primé par le Prix Marcel Dassault pour ses travaux sur l’autisme. Ses recherches portent sur l’altération de la perception des stimuli tactiles, une hypersensiblité ou une hyposensibilité qui entraînent un comportement d’aversion et des sensations désagréables chez les autistes.

Analyser les circuits cérébraux 

Pour mieux comprendre pourquoi ces douleurs ou cet inconfort se manifestent, le Dr Frick suggère de se concentrer sur les zones du cerveau responsables de cette anomalie. « Nous aimerions mieux caractériser les altérations sensorielles ainsi que les mécanismes neurobiologiques qui mènent à l’altération des circuits cérébraux impliqués dans le traitement de l’information sensorielle« , explique le chercheur. Grâce à un électro-cardiogramme et une IRM, il prévoit d’analyser la réponse à des stimuli tactiles chez des souris. « Il est possible de stimuler sa patte comme on stimulerait la main d’un patient. Nous nous concentrons sur les stimulis tactiles car c’est le plus facile chez la souris. » Le Dr Frick espère identifier des biomarqueurs pour ensuite orienter de nouvelles études chez l’Homme. « Ce marqueur objectif, translationnel et non verbal dans les troubles du spectre autistique pourrait être complémentaire des évaluations comportementales et psychologiques actuelles. » 

Pas une seule mais plusieurs formes d’autisme

« Chaud, froid, douleur, toucher insupportable« , ces altérations de la perception sont particulièrement handicapantes pour les personnes souffrant de troubles autistiques, rappelle Marion Leboyer. « Les industriels de la pharmacie ne s’intéressent plus aux maladies mentales et ce secteur est délaissé. Le problème, c’est qu’on n’arrive pas à identifier des sous-groupes de malades afin de mieux cibler différentes entités cliniques. Quand ce n’est pas précis comme ça, c’est compliqué de trouver des médicaments adaptés.« 

Elle espère qu’à l’avenir, il n’existe plus « un autisme » mais « plusieurs formes de troubles du spectre autistique« . « Cette pathologie est fréquente et doit être considérée de façon bien plus large. C’est un travail de titan de classifier chacun des symptômes mais il doit être fait. C’est le même procédé pour toute l’étendue des troubles bipolaires qui, autrefois, étaient tous regroupés sous l’appellation de psychose maniaco-dépressive. » Une classification importante au vu du nombre d’individus atteints par cette pathologie. En France, entre 300.000 et 500.000 personnes sont atteintes d’un trouble envahissant du développement dont 60.000 personnes autistes. 8.000 enfants autistes naissent chaque année, ce qui représente 1 personne sur 150 selon l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm).

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