Une mère et sa fille racontent les ravages du Distilbène

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Une mère et sa fille racontent les ravages du Distilbène Dans Les Résistantes, un livre de Florence Méréo, Pamela Solère et Karen Libutti témoignent sur la dangerosité du médicament autrefois prescrit pour prévenir les fausses couches Les deux femmes étaient en dédicace à la Fnac. Sorti en octobre, ce livre réunit les témoignages de douze lanceuses d’alerte, notamment sur les effets secondaires de médicaments. /photo j.s. Sa vie a basculé en 1983. Dans une revue spéciali sée, Pamela Solère dé couvre les méfaits du Distil bène. En 1973, alors qu’elle était enceinte, son médecin lui avait prescrit pour diminuer le risque de fausse couche : « Je ne m’étais jamais posé de ques tion, on ne savait pas, à l’époque, qu’un médicament pris par les femmes enceintes pouvait traverser les placen tas ». Inefficace, le Distilbène est proscrit en 1977 en France (il l’avait déjà été en 1970 aux États-Unis et en 1974 en Angle terre) . Mais le mal est fait. Des milliers de femmes comme Pa mela en ont déjà été victimes. « Pour les mères, la consé quence principale est le risque accru de cancer, notammentdu sein, explique Karen Libutti, sa fille. Pour les enfants, le risque « C’est tout simplement le premier scandale médical. » karen de cancer est également plus im portant. Les filles ont beaucoup de mal à avoir des enfants. Pour ma part, j’ai fait une fausse couche et j’ai un suivi gy nécologique strict depuis tou jours. Pour avoir mon fils, j’ai été surmédicalisée, alitée six mois et il est né prématuré. » Dès 1988, Pamela s’engage au sein du Réseau DES, l’asso ciation des victimes du médica ment. « J’y ai rencontré des femmes qui ont connu le même problème que moi, ça l’a rendu réel, indique-t-elle. Quand on veut dénoncer quelque chose, faire avancer une cause, il faut se mettre ensemble. Et de soli taire, on passe à solidaire. » En janvier, c’est lors de l’as semblée générale de l’associa tion que les deux femmes font la connaissance de Florence Méréo. Journaliste au Parisien, celle-ci recherchait des témoi gnages pour un livre. En oc tobre, elle publie Les Résis tantes, chez Harper Collins. Douze témoignages de femmes, lanceuses d’alerte, qui se sont battues pour faire éclater des scandales comme celui des prothèses PIP ou de la Dépakine. « Ne pas parler, c’est une double condamnation » « Ce qui me désole, c’est que les leçons du Distilbène n’ont pas été retenues, confie Pame la. Le Distilbène a été le premier perturbateur endocrinien. C’est aujourd’hui le modèle enseigné dans les facs. » « C’est tout sim plement le premier scandale médical », abonde Karen. Avec ce témoignage, elles es pèrent encourager encore plus de victimes à pousser la porte de leur association : « Des mères ont beaucoup culpabilisé, dé taille Karen, 45 ans, assistante commerciale dans la vie. Cer taines ne parlent plus à leur fille. À l’époque, il y avait beau coup de choses taboues. En se re trouvant, elles se sont rendu compte qu’elles n’étaient pas fautives. » « Pour faire avancer une cause, il faut se mettre ensemble. Et de solitaire, on passe à solidaire. » pamela « Ne pas parler, c’est une double condamnation. Le si lence, c’est un poison, confirme sa mère, 82 ans et ancienne conseillère conjugale au Plan ning familial d’Avignon. Il y a aussi une tendance à dire que c’est une histoire du passé. Un gynécologue connu ici m’a dit que le problème n’existait plus. C’est une histoire ancienne mais réactualisée tous les jours. La tragédie, c’est que des mil liers de femmes ne savent pas qu’elles sont concernées et qu ‘elles doivent avoir un suivi particulier. » Avec ce livre, Pamela et Ka ren espèrent aussi « une recon naissance officielle qui serait le remboursement intégral du sui vi gynécologique de ces femmes ». Pour Karen, ça serait la moindre des choses : « Les la boratoires pharmaceutiques m’ont volé une partie de ma vie. » Avec les dix autres té moins du livre, mère et fille se sont réunies récemment à Pa ris. « On a rencontré des per sonnes merveilleuses et avec toutes nos histoires, on va s’épauler », conclut Karen. Une manière d’être plus fortes en semble et de donner encore plus de sens au titre du livre qui les réunit.

Jonathan SOLLIE

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